José-Flore TAPPY
« Quiconque a connu Roud se souviendra toujours de son apparence délicate, de sa voix ténue, presque effarouchée devant l’interlocuteur; de sa réserve et de son regard craintif; fragilité que traversait parfois, d’un mouvement vif et même cinglant, un trait d’humour. Sa prose étonne, alors, par son autorité, sa vaste respiration, sa vigoureuse sensualité. C’est que deux voix, deux visages alternent en Roud, déchiré sa vie durant entre la détresse de l’exclusion et l’ardeur de la vie, la solitude et le rêve d’une rencontre, le désert intérieur et l’errance la plus lumineuse. »
Etat de veille Revue europe. octobre 2002
« Le poète Gustave Roud a marqué la Suisse romande d’une présence unique et rare, en un siècle de grande effervescence littéraire. »
Jaccottet – Gustave Roud. Correspondance 1942-1976.
Les cahiers de la NRF Gallimard 2002Philippe JACCOTTET
(Visite à Gustave Roud)
« Le soir tombait sans que la lampe fût aussitôt allumée ; on avait tout le temps de sentir son lent déclin dans la maison ; bien qu’abrités, on percevait, tout proche, le monde élémentaire, dans sa constance, sa tranquillité, sa murmurante puissance. Les paroles allaient sans hâte dans l’air, comme des fumées ; les silences étaient pleins de leur écho ; des livres s’ouvraient comme s’ouvrent les cassettes dans les contes. […] Pas de débats, presque pas d’ »idées » […] Simplement se rebâtissait chaque fois l’espace nécessaire pour que les seules voix qui comptent fussent entendues. »
Gustave Roud par Philippe Jaccottet. Seghers, 1968 (Rééd. 2002)
« Roud a cité souvent, et on ne peut éviter de le faire après lui, ce fragment de Novalis qu’il a traduit ainsi: Le Paradis est dispersé sur toute la terre, c’est pourquoi on ne le reconnaît plus. Il faut réunir ses traits épars. Ce fragment est une des clés de son oeuvre… »
Préface à Air de la solitude. Gustave Roud. NRF Poésie Gallimard 2002
« Chez Gustave Roud, il arrive que la brume se déchire, que l’amour redevienne possible, et du même coup la magie de l’art. Un paysage s’établit. Tout un monde se rebâtit, non point par éclairs, mais lentement, précautionneusement, solennellement, par de longues phrases harmonieuses, subtiles, tendres ; tantôt par morceaux, par touches qui ressemblent à des notations de peintre […] En les lisant, on n’est pas surpris d’apprendre que Roud admire par-dessus tout Poussin, Vermeer et Cézanne, organisateurs d’harmonies à la fois nobles et mystérieuses, véritable rassembleurs du Paradis terrestre. »
Ce qu’on arrache à la brume. NRF, février 1959. Revue europe. octobre 2002
« Roud a ressemblé à ces savants et acharnés défricheurs de textes écrits dans des langues très anciennes et presque inconnues qui y cherchent le secret de la vie et n’en meurent pas moins à leur tour. Il lisait le monde autour de lui, autrement que nous, il y découvrait des fragments de promesse comme dans une bible de verdure et de terre, il ne cessait de le relire; mais souvent il se demandait s’il n’avait pas mal lu, s’il ne s’était pas fait illusion. Pour imputer ses doutes, finalement, à sa propre faiblesse. »
Gustave Roud. 24 Heures, Lausanne janvier 1977. Revue europe. octobre 2002
CARO
« Roud voit tout, pas seulement le donné, l’offert, mais aussi le caché, l’invisible; il se meut à l’abord caché des éléments quasi divin, et pourtant rien en lui de démiurgique, son approche n’a rien d’hugolienne, il ne brasse pas les forces et formes à l’oeuvre en titan avide… »
Préface à Requiem et autres poèmes. Gustave Roud. Editions Zoé. 2024
ALAIN LEVEQUE
« Le foyer rayonnant de cette campagne réinventée est le paysan dans sa maturité et sa force. Roud le glorifie en une image qui participe de celle, primitivisante, de l’homme naturel […]. Mais la figure qu’il représente déborde le mythique ou l’allégorique. Icône profane, il incarne le vivant-mortel dans son absolu tel que Roud le rêve. Il est un frère ontologique, l’autre ardemment désiré et en lequel le poète continuera de croire jusqu’à la fin, non sans savoir que cet être mi-réel, mi-fictif ne cesse de renaître de son imaginaire et des cendres d’une aspiration impossible à assouvir.
Une quête de l’être au monde. Revue europe. octobre 2002
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